dimanche 22 avril 2012

Résistance hippie

Sana est un petit village perché dans la forêt, aux bords du fleuve Sana, à quelques heures de Rio. Destination idéale pour changer de la plage (tellement blazant les plages paradisiaques), et se faire quelques jours à la roots ; waterfalls, sex and drugs au programme. Malheureusement, compte-tenu de mes congés maintenant limitées, on est partis pour le week-end de Pâques, une tente et de l'antimoustique sur le dos, et on n'était pas les seuls à avoir cette idée...

Heliconia 





En plus de la surpopulation à Sana pendant le week-end de Pâques, parlons un peu du profil des visiteurs en question. Quand la favela s'invite à Sana, et qu'on est venus chercher la tranquilité au milieu des cascades, on est un peu deg. Notamment quand il est impossible d'écouter le murmure de l'eau ou le chant des oiseaux pour cause de funk à répétition de 8h à 23h, face à des obèses, une bière à la main et les fesses à l'eau. Alors, on le prend à la rigolade, on fait quelques mouvements de funk et on s'amuse de ces brésiliens siii bons-vivants, mais le tas de déchets laissé à la fin du week-end est moins rigolo... 
Les habitants de Sana, venus s'abriter de la société de consommation et du climat de violence de Rio, n'esquissent même pas un sourire, et sont simplement écoeurés de voir ces touristes "dénaturer l'esprit de Sana"... Et la tolérance de la petite serveuse d'un resto bio ne se s'améliore pas quand elle retrouve du vomi au petit matin en bas de sa porte ! 


Depuis une petite dizaine d'années, l'identité hippie de Sana permet de faire le business de certains proprios de camping ou auberge. Les touristes brésiliens s'en amusent, achètent des accessoires à forte tendance tricolore, et c'est parti pour deux jours déguisés à la mode rasta ou hippie. Mais c'est récent. Sana est né dans les années 70, quand une bande de "chevelus" ("cabeludos") comme on les appelait à l'époque ont débarqué pour fonder une micro société alternative, à base d'herbe, de peu de vêtements et de beaucoup d'amour, loin de la répression de la dictature militaire. C'était même pas possible d'y accéder en voiture d'ailleurs, un pont n'a été construit qu'à la fin de eighties. 



Message d'un camping

L'art contemporain de Sana :)



 Un terrain de foot et des strings, on est au Brésil quand même, merde ! 





Une tente qui prend l'eau, un réchaud, un maillot de bain, des bières et des glacesarti sanales aux saveurs de fruits tropicaux dont j'ignorais l'existence. Des nuits courtes sans matelas, des concerts de reggae suivis de baile funk,quelques pas de forro, un spectacle de maracatu, des cascades, des baignades en eaux limpides et revigorantes bienvenues en lendemain de soirée difficile. Trois jours bien remplis, l'heure est venue de replier la tente. Ma cheville est tout enflée et je boite. Sous les conseils de mon entourage, je me rend au "poste d'urgence" de Sana, où un petit médecin lisait une revue en attendant le malade.Il commence à m'examiner, quand on me crit : "Manon ! Viens vite, le bus est arrivé!" Je pars en courant comme je peux, prends mon queschua et monte dans le bus. Il faut compter quatre bus ou vans pour se rendre à Sana...sauf quand tu n'as pas pensé à acheter ton billet de retour le dimanche de Pâques, et qu'il n'y a plus de places dans les bus pour Rio. Dans ce cas-là, il faut être plus patient encore. 


Après trois bus, alors qu'on commençait à douter du lieu où on dormirait la nuit-même, un type tombe du ciel, en criant "gare routière Rio, gare routière Rio!" On se précipite dans son van, où il entasse une bonne quinzaine de personnes. Et la partie commence seulement quand il nous sort "normalement c'est 13 reais, aujourd'hui je prends 18reais mais j'vous fais éviter les embouteillages. Vue la situation de la route, vous devriez arriver à Rio en 5heures, mais j'connais un chemin et dans deux heures vous êtes chez vous". Après une heure et 10minutes exactement de frayeurs, crise d'angoisse et tentative de relaxation sous fond musical (le chauffeur roulait à fond, uniquement sur la bande d'arrêt d'urgence et entre les deux voies, il avait surement abusé de Need for Speed dans sa jeunesse), on descend en remerciant le seigneur de nous avoir protégé un jour de plus. On est quand même deg de l'avoir payé pour l'entendre crier "hahahaha vous voyez je vais plus vite que tout le monde!!", mais nous sommes arrivés à destination, tout va bien. Enfin, ça ira encore mieux quand on aura quitter cet endroit glauque qu'est la gare routière de Rio, et quand j'aurai payé 150 euros de médecin pour me faire soigner. 

vendredi 20 avril 2012

"Hé Momo ! Tu descends?"


A la fin de l’été, tous les cariocas n’attendent qu’une chose : l’apparition du roi Momo, le seul et unique. Symbole de tous les excès, cette charmante bête de 160 kilos a le privilège d’annoncer le début des festivités du carnavaaaou do Rio de Janeiro.
"Je salue la famille royale carioca du roi Momo. Je passe mes fonctions de maire au roi Momo. Je lui donne tous les pouvoirs sur la ville" a annoncé Eduardo Paes en lui transmettant la clé symbolique de la ville, recouverte de strass. Les autorités lui avaient cependant fait comprendre, que dans le cadre d’une campagne contre l’obésité, il sera préférable qu’il fasse un peu fondre  sa graisse au soleil. 

Le carnaval officiel, celui qu’on voit sur les écrans de télé de Hong-Kong à New York, est celui du sambodrome, où défilent une vingtaine des meilleurs écoles de samba de Rio dans l’espoir de séduire le jury et remporter l’évènement le plus important de l’année. Pourtant, une poignée de privilégiés seulement assistent au grand spectacle, pendant que la majorité de cariocas et de touristes transforment les rues de Rio de Janeiro en une pure explosion de vie, de couleurs, de joie, et de beuverie.  Les « blocos », itinérants ou fixes, proposent   chacun leurs chansons du carnaval, souvent de samba, parfois de samba-jazz, samba-rock  ou même d’électro. 

Le carnaval 2012 en quelques chiffres :
*A Salvador, 10 millions de litres de bière consommés ( ce qui n’est pas beaucoup finalement, sur les 10 milliards bus annuellement au Brésil, selon le Sindicato Nacional da Indústria da Cerveja)
*70 millions de capotes distribuées dans tout le Brésil 
* 5 millions de personnes dans les rues de Rio de Janeiro pour le Carnaval 
* 15000 toilettes publiques installées dans la ville de Rio 
*1.014 arrestations pour « pipi sauvage » à Rio
* 500 000 personnes défilent dans l’Avenida Rio Branco, dans le centre de Rio, pour le show de Monobloco dimanche 26 Fev. 


C’est Unidos da Tijuca qui sort, pour la troisième fois de son histoire, gagnante du carnaval de Rio cette année, après avoir détrôné Beija-Flor championne en 2011 (12 fois gagnante). 
Alors que de nombreux gringos achètent 250 reais ou plus sur Internet leur entrée pour le sambodrome, on peut acheter ses places pour moins de 50 reais le jour même, à l’entrée du sambodrome.

Pour ma part, je me suis pas très bien débrouillée, et je n’ai pas pu entrer au Sambodrome pour les jours de défilés des écoles du groupe A (meilleur groupe). Il n'est d'ailleurs pas difficile, même pour un gringo, de défilé au sein d'une école de samba de niveau moyen, l'achat du costume et quelques répétitions suffisent !

Je me suis quand même bien fait plaisir, et gratuitement, pendant trois soirées : répétition générale de Beija-Flor, défilés des enfants et défilé des écoles du groupe B. 
Les vidéos qui suivent sont donc extraites du défilé des écoles du groupe B (niveau  incomparable avec celui des trois gagnants le samedi soir) ! 





Le public est aussi bien apprêté...







dimanche 15 avril 2012

"Samba de la paix"

Quand les policiers militaires ouvrent le bal... 

Samba da Paz, Feb 2012, favela Carioca do Tuiuti. 
Auteurs : AFP.

De la toge à la coiffe

Auteur : AFP.

Quelques heures de carnaval...




Le son de la batucada résonne déjà et les rayons de soleil m’agressent doucement quand mon téléphone vibre : «  Je suis dans un bloc à Leblon, tu te lèves ? ». Il est 8heures du matin. Je me suis couché quelques heures plus tôt ; j’ignore donc ce message et somnole jusqu’à ne plus résister à la chaleur et à l’envie de me recouvrir de plumes. 

Je jète un petit coup d’œil sur internet pour voir ce que je pourrais bien faire de mes fesses aujourd’hui….  Samba à Leblon ou Samba à Copacabana ?  A Tijuca ou à Gloria ? Réveille-toi et viens t’amuser, Esclaves de Maua, Suce mais ne bois pas, Carmelites, Sans notions, Sympathie est presque amour, Pop-corn dans le miel…. Par quel bloc commencer la journée…enfin...la soirée ?  Finalement, en retenant la leçon de la vieille, on opte pour "Il est petit mais va grandir". Oui, le nom est cool, et on ne veut pas se retrouver comme hier au milieu d’une foule sans fin de gens saouls à se faire marcher sur les pieds… J’enfile ma tenue de la journée, on descend de l’appart et, à l’angle de la rue, un groupe de samba-jazz nous fait la surprise de sa présence… Un délice de commencer la journée  en dansant autour d’un trompettiste brésilien, une Antârtica à la main. Et oui, cette marque de bière a le monopole de la zone sud de Rio pendant le Carnaval, on ne trouve que ça. Business business. Et on a tellement soif que nos canettes sont de véritables tonneaux des Danaïdes. 

Après plusieurs heures à suivre le char du « bloco », à contempler les bundas de belles mulâtres aux rythmes de la samba, à délirer avec des gros tout plein de sueur, à se faire accoster, à manger des « porcarias » (cochonneries en brésilien) et bien sûr à assouvir notre soif, on a déjà un bon coup de barre. Une petite virée à la plage ne serait pas de refus. Je n’ai pas de maillot de bain, mais tout le monde est déjà presque nu de toute façon dans ce pays, allons-y en soutif. Sur le retour, toujours en soutif, on passe au supermarché faire des recharges de cachaça pour ce soir. Même s’il n’y a pas de bloc la nuit, on devrait réussir à trouver une soirée ou deux dans le coin.  Bon, qui fait les caïpirinhas?








Mesdames, en cas d'urgence, brisez la vitre et tirez la  manette. (Elegance et charme carioca)


Parce qu'il vaut mieux toujours en avoir sous le coude, ou plutôt sous l'oreille, les boucles d'oreilles en capote, c'est notre ASTUCE.  


Photos : Max Harris.