mercredi 28 septembre 2011

Guerilla Poubelle



La vie d’une poubelle en France…. n'est pas très funky. Les hivers sont rudes. La couleur est terne. Surtout, cette pauvre petite est bien délaissée… Bon, certes, y’a bien quelques jeunes qui passent à 4heures du mat’ en sortant du Do Mac (phénomène bien connu de la dalle post-cuite), et puis cette ptite vieille venue déposer de l’étron canin au petit matin… Mais qui vient prendre des nouvelles, voir ce qu’elle a dans les crocs jours après jours, à l’exception de Didier, le malheureux sans-abris du quartier ?
Personne.

Au pays du carnaval, la poubelle est orange, c’est nettement plus chouette. Et puis elle, au moins, a du passage, ambiance festive 24/24h assurée. La poubelle du centre de Rio voit les femmes d’affaires brésiliennes -  les ongles parfaitement vernis de la veille, tailleur et talons hauts - déposer leur café et les étudiants leurs canettes de bière ; tous les cadres et futurs cadres s’agitant autour d’elle en la récompensant régulièrement de quelques déchets. A la tombée de la nuit vers 6 heures, une toute autre rencontre se prépare. Clochards et adolescents des favelas envahissent les lieux, venant voir si la pêche du jour a été bonne. La poubelle de Rio n’est jamais seule. Mais il faut bien avouer que souvent, elle se sent assez inutile…incapable de répondre à la demande.  Elle est mignonne mais du haut de ses 50 cm, elle est clairement désarmée face aux montagnes de déchets formés à ses côtés.





Bon… là, vous vous dites surement… L'heure est grave, Manon fume beaucoup trop au Brésil. Beaucoup trop. Honnêtement, je n’aurai jamais eu l’idée d’écrire sur la vie d’une poubelle en Europe. Mais ici, les déchets font tellement partie du quotidien qu’il était difficile de passer outre, et sont – il me semble – à l’image du modèle brésilien de développement. N’ayant aucun contrat publicitaire de signé en ce moment, j’en profite pour ne pas vous offrir uniquement l’image du Copacabana-des-surfeurs, mais aussi celui des gamines de 10 ans, souvent noires et assez maigres je me permets de le dire, se jetant sur les déchets ( y compris les carcasses de viande ) du supermarché « Pao de Açucar » - construit en théorie pour ne subvenir qu’aux seuls besoins de la classe moyenne supérieure carioca. En pratique, il nourrit quelques autres malheureuses bouches. Mais les déchets sont plus que ça ici ; ils représentent à Rio une véritable industrie… et sont créateurs d’emploi.

Un gringo doit toujours se rappeler d’une chose ici ; SOYEZ ASSISTES ! Ce serait presque mal vu de ne pas l’être d’ailleurs. Si vous avez les moyens, ne faites pas à manger, une employée le fera pour vous. Ne faites pas le ménage, quelqu’un le fera pour vous. N’appuyez pas sur le bouton de l’ascenseur, quelqu’un le fera pour vous (oui, ce boulot existe. Rester toute la journée dans un ascenseur à appuyer sur des boutons). Ne mettez pas vos courses dans les sacs plastiques (l’heure de l’écologie n’a pas encore sonné), quelqu’un le fera pour vous. A une soirée à la fac, j’avais 1 canette de bière vide à la main, un pote brésilien a du me crier dessus : « Jette-la par terre ! » Deux minutes plus tard, elle était déjà ramassée dans un sac de recyclage. Ne pas trier les déchets donc, quelques brésiliens en feront leur moyen de subsistance.

En grossissant le trait, Rio, c’est une classe moyenne qui consomme, et une autre qui travaille pour elle, et trie ses déchets. C’est le Rio qui commence à accéder à un pouvoir d’achat vs. le Rio des favelas. Pourtant, il y a sans aucun doute un respect mutuel - voire une solidarité - entre ces deux catégories interdépendantes. Pour l’anecdote, quand j’étais accueillie par la famille brésilienne à mon arrivée, après un bon repas (fondue suisse accompagnée de vin rouge chilien), le père de famille préparait du pain/beurre pour que le gardien de nuit ait quelque chose dans le ventre.

Pour mieux comprendre tant les problématiques environnementales que sociales carioca, je vous invite à voir le documentaire de Lucy Walker, « Waste Land », qui les illustre à merveille.
 Voir gratuitement le film en ligne (anglais/portugais) :
  Il retrace l’expérience de Vik Muniz, artiste brésilien vivant à Nova Yorque, ayant transformé les déchets de Rio en œuvre d’art et quelques trieurs de déchets en star d’un jour. La première partie est un beau voyage au milieu d’un jardin carioca… le Jardim Gramacho ; plus grand tas de déchets d’Amérique Latine, et nous emmène à la rencontre de quelques « catadores », alors que la seconde met l’accent sur le travail artistique en lui-même. Initiative innovante. Le film a d’ailleurs été nominé aux Oscars… A noter : la critique du Monde vaut quand même la peine d’être lue : (http://www.lemonde.fr/cinema/article/2011/03/22/waste-land-spectaculaire-entreprise-d-autosatisfaction-sur-le-dos-de-la-misere-du-monde_1496564_3476.html).

Bon visionnage ! 

mardi 27 septembre 2011

Paqueta


Imagine une île au creux de la baie de Rio de Janeiro,

Imagine un havre de paix sous les palmiers, si calme que l'océan lui-même paraît être lac,
sur lequel d'immenses galets flottent harmonieusement  ;
Imagine une imposante chaine de montagnes traçant l'horizon bien au loin,
Imagine un lieu où seules charrettes et bicyclettes roulent doucement (trop chouette.)
Imagine des gamins ni mendiants ni trafiquants, simplement souriants
Imagine des notes de samba résonnant dans ton cœur
Imagine un jus de fruit de la passion … fait devant tes yeux avec amour,
Que cette douceur brésilienne ne s’arrête jamais…

Mais… imagine cette baie de Rio de Janeiro,
où usines répandent jour après jour de généreux déchets,
fruits non pas d'une passion, mais d'un capitalisme sauvage,
Imagine cet enfer noir menaçant violemment un bout de paradis blanc,

Bienvenus, mes amis,  à l’Ile de Paquetà.











dimanche 11 septembre 2011

Viens... Viens chercher bonheur dans mon jardin



De Santa Teresa au Jardin Botanique entre colocs...




"Me de um beijinho meu amor"







Pau est un bois brésilien... mais le mot est plus souvent utilisé pour qualifier l'organe génital masculin. 





Havre de Paix dans cette jungle urbaine

Diet à la brésilienne ou le trio Coca, Pastel, Brownie.

A tous les parents, si vous avez souffert de l'organisation de l'anniversaire de votre gamin,  épuisés par la chasse au trésor qui a fini en bataille de dragibus, pensez que vous, au moins, n'êtes pas obligés de vous déguiser en loup, ou en girafe, comme tous les autres parents présents.
Youyou toi


Les brésiliennes m'ont donné du boulot, vu qu'elles voulaient toutes une photo d'elles dans toutes les positions possibles et imaginables ici, puis là, puis là à coté, puis juste ici, sur le pont, et encore un petit click, click, click...







"Gaby, prends le tronc dans tes bras, et sens l'énergie positive de l'arbre, les ondes positives qu'il t'envoie... Tu te sens pas plus reposée maintenant?"



Dimanche 4 Septembre
Brésil.

jeudi 8 septembre 2011

Simon


Je m’appretais à écrire un article sur le tragique accident de Bondi, responsable du décès de 5 personnes (dont le souriant chauffeur en photo un peu plus bas), sans compter la cinquantaine de blessés, dont j’ai été en partie témoin en face de chez moi. 

Pourtant, c’est comme la priorité au direct de DSK, certains sujets touchant plus directement mon petit égo passent évidemment au premier plan..

Je voudrais faire un grand hommage à Simon, subitement décédé ce mercredi 7 Septembre 2011. Il a été le premier chanceux à recevoir mes baisers à peine sortie de la maternité, mais sa place dans mon cœur est aujourd'hui et à tout jamais celle d’un frère ou d’un cousin. Simon était le roi, le roi des plans foireux, de l’opposition et de la confusion ; ça en faisait son charme. Pourtant, sous ses bras musclés – et mis en valeur avec précaution – se cachait un royaume de générosité, de passion et tendresse. 
Simon tu me manques déjà... J'ignorais jusqu'ici ton importance pour mon équilibre intérieur, j'ai cette impression étrange qu'on m'arrache une moitié ; la psychologie de l'enfance expliquerait à merveille cet inconscient, mais j'en suis dubitative donc je m'arrêterai là. 
A ta famille, et surtout à toi Laurence, je vous apporte tout mon soutien et mon amour pour ce tragique évènement ; du loin de mon Amérique, je regrette du fond du coeur de ne pas être physiquement à vos côtés.. Laurence, je vous aime et vous embrasse très fort.











"Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté"

jeudi 1 septembre 2011

On a pas tous les jours 21 ans à Rio de Janeiro

Avant

Après
A celles qui se plaignaient que je ne mettais pas assez de photos de mon quotidien, cette vidéo est l'occaz' de voir mes colocs ( que jusqu'à fin septembre). Vous l'aurez remarqué, elles sont...bien brésiliennes :-)

De mon côté, je suis bien breizhilienne à présent...


Plus ... comment dire....gringas.

Passer un an à l'étranger c'est bien sûr aussi y fêter son anniversaire, de préférence avec les coutumes locales. J'ai pas eu trop de mal à festoyer à la brésilienne, c'est leur spécialité :). J'ai trainé mes potipotes dans un club de forró... kékeuçè struc la? C'est une musique et danse du Nordeste du Brésil, Rio n'est donc pas le meilleur endroit pour le danser, mais j'ai déjà eu l'occasion de m'amuser un peu (Festas juninhas nordestinas organisées aussi à Rio cet été, et le Club des Democraticos en bas de chez moi qui propose une soirée forró tous les mercredis soirs, etc). Trois instruments suffisent pour entrainer une foule brésilienne dans la joie et la bonne humeur: un accordéon, un tambour (zabumba) et un triangle (non, ici tu n'as pas l'air d'un con quand tu joues du triangle).Malgré l'apparence "fête de village" des festas juninhas, le forro est une danse... sen-sueeeeellle. 

Un classique : 

J'ai pas encore tout intégré, mais y'a plusieurs styles de forro... Le plus traditionnel et le plus facile étant forro pé de serra - "truc de looser" selon mes colocs, moi j'aime bien :) ( jsuis encore très limitée dans mes pas, mais j'vais prendre des cours à la fac)

(vous m'avez vu ?)

Forró un peu plus élaboré ("estilizado") : 



Emportés par ces pas, qui nous trainent et nous entrainent, écrasés l'un contre l'autre, nous ne formons qu'un seul corps... Et le rythme sans effort nous emmène, enchainés l'un et l'autre et nous laisse tous deux épanouis, enivrés et .... heureux.


Back To Black.

«Dans la tendresse, la mimique excessive, dans le catholicisme qui charme nos sens, dans la musique, dans l’allure, la parole, dans les berceuses pour enfants, dans tout ce qui est expression sincère de vie, nous portons quasiment tous la marque de l’influence noire ». Gilberto Freyre
Pourtant, en arrivant à la conférence précédant le concert, une intervenante annonce la couleur du festival : 
« Je remercie et j’encourage cette initiative du Festival Back-2black qui permet, pour une fois, de valoriser la culture noire dans une perspective moderne, d’intégrer la négritude dans la contemporanéité ! La culture noire au Brésil est en permanence perçue comme appartenant à la tradition, à l’ «archaïque», réléguée au rang de ce qui appartient au passé, contrairement à la blanchitude, à l’occidentalisme, qui eux seuls symbolisent la modernité dans la société brésilienne d’aujourd’hui! » 
Il m'est difficile pour l'instant de me prononcer sur la démocratie raciale brésilienne tant le phénomène est complexe, mais de mon expérience, je peux l'affirmer, rien de plus « in » pour de jeunes cariocas d’aller en « boatch » et faire vibrer son corps au rythme de la musique électronique à Ipanema… « Là-bas, les garçons sont beaux et intéressants » (selon mes colocs). Pourquoi intéressants ? Car riches DONC cultivés ! Je grossis un peu le trait, mais globalement c’est le raisonnement.

J'ai beaucoup aimé cette soirée Back 2 black  (= elle a envoyé du faaaaat :), à l'intérieur de l’ancienne gare Leopoldinha, zona Norte de Rio, réaménagée en salle de concert (avec d'autres petits concerts à l’intérieur des anciens trains, coolos). Au programme : Asa, Aloe Blacc, et Seu Jorge (célèbre chanteur carioca) suivis de Djs. Les conditions étaient juste idéales (sauf notre état de fatigue – c’était notre 4ème soirée d’affilée) ; on était quasiment au premier rang, et étonnement la salle n’était pas blindée… Aucun pogo, nul besoin de s’aggriper de toutes ses forces à la barrière devant ou de bourriner dans l’adolescent à ses côtés pour espérer voir un bout de visage du chanteur. 
Asa est géniale sur scène ; humble, douée (chant, danse, trompette, guitare...) et drôle qui plus est. « Où est ce qu’on peut sortir tous ensemble après le concert ? » « LAPAAA ! » répond le public en cœur. Elle comprend « Rapa » et nous invente une chanson sur : « on va sortir à Rapa ce soir ». Dommage.
Le concert d'Aloe Blacc était stylé aussi ; sa soul est funky et étincelante, le show vaut la peine d'être vu, mais un brin de modestie est à mon goût l'ingrédient manquant à sa recette...
Quant à Seu Jorge, ancien gamin des rues très populaire à Rio, je pensais pas sa musique aussi électro/rock et éloignée de la samba traditionnelle ; j’ai l’impression que le bonhomme et sa musique ont évolué, et pas forcément dans le bon sens… Il est arrivé sur scène les yeux défoncés, une clope dans la main droite, une bière dans l’autre - c'était surement pas sa 1ère goutte de la journée. Avant de quitter la scène, il a levé sa bière dans notre direction, c'était un assez bon résumé de son show. Heureusement, il est doué et ses chansons sont connues par tous ici ; donc même un déchet de Seu Jorge, ça passe...


Sur ce, je vous laisse en musique, désolée pour la qualité du son, sa-tu-ra-tion. 


PS : Inutile de préciser qu'une fois le pied posé dehors, des gamins noirs nous attendaient en mendiant...